Un article de l'OBS sur la politique de Laurent Wauquiez en région.
Le budget régional pour le secteur restera stable par rapport à la période précédente (2,7 millions d'euros par an, selon les calculs de Reporterre). L'objectif affiché est d'augmenter de 30% le nombre de producteurs bio dans la nouvelle grande région d'ici 2021. Mais dans le détail, plusieurs des structures d'accompagnement et des réseaux d'agriculture paysanne sont lourdement touchés : la Fédération régionale d'agriculture biologique voit par exemple sa subvention diminuer de 500.000 euros par an dès 2017, soit près du quart de ce qu'elle touchait jusque là ; la coopérative Atelier paysan et Appuibio perdent respectivement 75.000 et 30.000 euros par an. Et le budget réservé aux AMAP (Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne) est lui aussi réduit.
"L'objectif est de remettre les chambres d'agriculture au centre et d'arrêter les doublons, pour meilleur développement du secteur bio", nous explique Dominique Despras, conseiller spécial à l'Agriculture bio au Conseil régional. Logique d'efficacité, donc. Mais l'opposition s'inquiète des conséquences de l'affaiblissement du réseau associatif. Corinne Morel-Darleux, du Rassemblement citoyens, écologistes et solidaires :
D'autant que les chambres d'agriculture, longtemps réticentes au bio, ne s'y sont pas toutes converties au même rythme, avertit Jean-François Debat, le président du groupe Socialistes et apparentés au Conseil régional. Lui voit dans la décision de la présidence de région une volonté de "contourner les acteurs sur lesquels elle a le moins de pouvoir"... Et d'adresser dans le même "un signal fort à la partie la plus conservatrice des agriculteurs : on vous débarrasse des écolos".
Au-delà du bio et de la production paysanne, c'est tout le maillage associatif écolo qui en prend un coup avec la politique de Laurent Wauquiez. Ainsi, la Frapna (Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature), principal acteur de l’éducation et la défense de l’environnement dans la région, a vu sa subvention réduite de 50% en 2016 à 375.000 euros.
Dans le même temps, la seule Fédération régionale de la chasse a reçu près de 3 millions d'euros de la région. La décision a été annoncée en septembre. Explication à l'époque du vice-président de région Philippe Meunier, en charge de la chasse et de la pêche : les chasseurs "connaissent le territoire" davantage que les "bobos des villes".
Eric Feraille, le président de la Frapna, lâche simplement :
Eric Feraille anticipe, avec la décision sur les chasseurs, un appauvrissement de la qualité de l'éducation à l'environnement. Selon lui, les connaissances de la Fédération "se limitent aux espèces chassables, tandis que la Frapna a une vision d'ensemble, sur l'eau, l'air, les sols, la pollution..."
Pourquoi tant de haine ? Là encore, "Laurent Wauquiez s’oppose aux structures écolo car il considère que ce sont des nids de gaucho-écolo intégristes", ironise une conseillère régionale du groupe Socialistes et apparentés.
Laurent Wauquiez ne s'en cachait pas vraiment, durant la campagne, dans une lettre adressée à la Fédération des chasseurs et rendue publique par Reporterre. Il annonçait alors "un juste rééquilibrage des subventions qui ont beaucoup trop profité ces dernières années à des écologistes dogmatiques et guidés par des motifs purement idéologiques"...
Eric Fournier, vice-président en charge de l'Environnement et aux parcs régionaux, le confirme aussi lorsqu'il réfute toute volonté de détruire la diversité des acteurs de terrain :
La priorité budgétaire doit être donnée, explique-t-il, à l'investissement.
Autre signal négatif envoyé aux défenseurs de l'environnement : l'annulation de deux projets de Parcs naturels régionaux, la Dombes (Ain) et le Haut-Allier (Haute-Loire et Lozère). Ils avaient pourtant été actés... Ils ont été remplacés par des "contrats de territoire", moins lourds budgétairement.
Résultat, avec ces contrats territoriaux, "la Région contractera directement avec les communautés de communes, avec des règles différentes d'un territoire à l'autre, rompant le principe d'égalité des territoires", s'alarme Corinne Morel-Darleux, la conseillère d'opposition, y voit la mise en œuvre de l"'idéologie libérale" qui guide la gestion de Laurent Wauquiez.
Dans le même temps, les grands projets contestés ne manquent pas. Dans son Plan montagne révélé en mai, la majorité accordait 10 millions d'euros pour favoriser la neige de culture. Il faut dire que le conseiller de Laurent Wauquiez sur la montagne n'est autre que Gilles Chabert, ancien patron des moniteurs de ski. En plus des canons à neige, de gros chèques ont été réservés pour des projets de grande ampleur et critiqués pour leur impact environnemental :
Pour Jean-François Debat, du groupe Socialistes et apparentés, le président de région cherche à s'adresser "à la droite de la droite" nationale, en annonçant notamment la "fin de la récré" pour les bénéficiaires du RSA :
Le 23 novembre, c'est justement à Lyon que le candidat de la primaire de la droite et du centre François Fillon a choisi de délivrer sa grand messe. Une belle tribune pour Laurent Wauquiez, qui a pu assurer qu'il ne "veut pas entrer au gouvernement en 2017". Histoire de rester vierge pour 2022 ?
Agathe Ranc